L’anarchisme individualiste et la reprise individuelle

L’anarchisme individualiste puise ses origines dans la pensée de Marx Stirner, il prône que l’émancipation individuelle doit précéder l’émancipation collective. Albert Libertad, une des figures de ce mouvement, affirme sans détour que « ce n’est pas dans cent ans qu’il faut vivre en anarchiste ». La révolution doit commencer chez l’individu lui-même. L’anarchiste individualiste rejette tout embrigadement dans les organisations syndicales ou politiques. Il entend rompre avec l’anarchisme communiste dont les tenants, adeptes des actions collectives et favorables à la constitution d’alliances avec les socialistes et les syndicalistes, estiment la révolution proche. L’individualiste encourage les actes de révolte individuelle afin de diffuser les idées libertaires qui amèneront à l’émancipation individuelle puis collective.

Ce refus des normes bourgeoises, comme des préjugés propres aux classes populaires, conduit les individualistes à inventer d’autres relations entre hommes et femmes (l’union libre) [...], et à développer un art de vivre transgressif. Leur refus du salariat les conduit à expérimenter la vie en communauté et à inventer d’autres modes de consommation (le végétarisme et le rejet de l’alcool par exemple), mais aussi à emprunter la voie de l’illégalisme (A. Steiner 2008).

L’illégalisme apparaît en France vers la fin des années 1890. Il suppose que tout acte commis contre la société est justifié, puisque cette société doit être détruite. Cette forme d’action directe peut prendre plusieurs aspects : la fausse monnaie, la contrefaçon, l’escroquerie, le cambriolage et le vol, le sabotage. Sous le vocable de reprise individuelle, ces « expropriations » sont dirigées contre les capitalistes et leurs représentants, contre la bourgeoisie, et visent à opérer une redistribution des richesses en direction des classes défavorisées. Il ne s’agit donc pas de voler mais de reprendre ce qui appartient à tous. De tels actes font partie intégrante d’un état de révolte permanente contre l’ordre établi. L’illégalisme est une manifestation de désespoir et de rage contre une société jugée intolérante. Il n’en demeure pas moins que cette forme de banditisme révolutionnaire reste l’apanage d’une minorité, la majorité du mouvement anarchiste s’en détournant et le condamnant.

Petit manuel anarchiste individualiste

L'illégaliste anarchiste est-il notre camarade ?