Vers la guerre (1948-1950)

De 1948 à 1950, la tension perdure dans la péninsule. La population espère toujours la réunification et considère la partition comme une indépendance tronquée. Au sud, le régime de Syngman Rhee devient toujours plus autoritaire. Les pouvoirs de la police sont élargis, toute opinion favorable à la Corée du Nord, à la réunification et au communisme sont passibles de sanctions. Le Parti des travailleurs du sud (communiste) est interdit. En 1948 le soulèvement dans l’ile de Cheju (sud-ouest de la Corée) est réprimé dans le sang, on dénombre environ 60 000 victimes. Les prisonniers politiques se comptent par milliers dans les prisons. Au nord, Kim Il-Sung renforce toujours plus son pouvoir. En juin 1949 le Parti du travail est fondé. Les sociaux-démocrates et groupes religieux sont mis au pas. Ainsi les deux Corées font preuve d’un raidissement de plus en plus affirmé, l’une au nom du communisme, l’autre au nom de l’anticommunisme.

Le long du 38e parallèle, les deux armées s’observent et s’affrontent ponctuellement au cours de violents accrochages, alors que des guérillas communistes s’activent au sud.

Sur la scène internationale, la proclamation de la République populaire de Chine en octobre 1949 renforce le camp communiste en Asie. A cette date Kim Il-Sung s’est décidé à réunifier la péninsule, convaincu de la faiblesse du régime de Séoul et de la non-intervention américaine. Malgré des réticences initiales, il obtient le soutien de Staline et Mao Tsé-toung au printemps 1950. Pour parer à tout échec, Staline lui demande de coordonner le plan d’invasion avec l’état-major des forces armées soviétiques, envoyant à cet effet en Corée du Nord une équipe de conseillers militaires. La sourde rivalité entre Staline et Mao joue également, le premier mettant au défi le second de soutenir plus directement Pyongyang.

A la veille des hostilités, l’armée populaire coréenne est assurément supérieure à son homologue sudiste. Le corps de bataille rassemble 120 000 hommes bien entraînés et équipés de matériel soviétique. Un tiers environ est constitué de vétérans de la guerre civile chinoise (1946-1949) ou des combats frontaliers. Son corps d’officiers est de qualité. Ajoutés aux 77 000 hommes des unités de service et de garde-frontières, c’est une force homogène et prête à remplir l’objectif de Kim Il-Sung. La campagne est prévue pour être courte.

En face, l’armée sud-coréenne ne présente pas les mêmes garanties. Les quelques 95 000 hommes sont mal équipés, ne disposant pas de matériel lourd. Le soutien américain est bien inférieur à celui des Soviétiques, malgré les demandes répétées de Séoul. Une partie des unités voit leurs effectifs amputés pour répondre à la menace représentée par les foyers de guérillas.

Si Pyongyang s’estime capable de réunifier la Corée, la guerre va cependant rapidement démontrer le contraire.